dimanche 29 mars 2009

La Yougo en 2CV, été 1962

Je laisse dans ce billet la place à mon ami Michel pour évoquer notre voyage en Yougoslavie à quatre en 2CV :
"Cette année 62, nous avions, toujours dans cette belle limousine verte, sillonné la Yougoslavie, nous : Jean-Claude, Jean-Paul, Claude et Michel. Ce pays était dirigé par Tito, qui avait réussi à unifier toutes ces ethnies, religions et économies. Nous faisions du camping sauvage. Le soir avant la tombée de la nuit, nous repérions un site, caché et protégé, où nous installions notre tente une fois le noir de la nuit venu.


Quelques rencontres marquantes ; ces jeunes joueurs d’échec, sur les hauteurs de Ljubljana, je crois, qui nous avaient bluffés par leur sérieux, surtout celui à lunettes, « le professeur », qui jouait très vite.
Quelque part en Serbie, notre irruption le soir, au milieu de jeunes campant dans la forêt et dansant autour d’un feu, une belle serbe m’avait entraîné dans sa danse et mes copains (pas tant que ça) avaient interrompu brutalement ce flirt naissant.

Puis notre découverte de Banja Luka, en Bosnie. Une petite bourgade près d’une rivière, non loin du site de Jajce et ses chutes fantastiques. Nous avions rencontré un jeune musulman, une force
de la nature, chef des jeunes du village, qui nous avait pris sous sa protection. Et en quelques jours, il nous a fait participer à sa vie, promenades avec ses copines, bain près de la retenue d’eau, avec un fort courant, il ne fallait pas rater son plongeon et se raccrocher à la digue avant les rapides. Un soir nous avons vidé des verres de slibovitza, pour le départ à l’armée d’un copain de notre mentor, et de retour au camping, la 2 CV a brutalement stoppé, les deux roues avant dans un fossé, et nous avons dormi là, en remettant au lendemain le dégagement de notre carrosse.

Je dois dire que ce voyage en Yougoslavie avait été paisible, que les populations rencontrées nous semblaient vivre pacifiquement entre elles et rien ne laissait présager les chaos des années 90, mais sans doute étions-nous naïfs

La conclusion du voyage, à Trieste, dans une petite maison, invités par des jeunes italiennes de Milan, rencontrées sur la côte croate. Seuls, nous avons joué au bridge, chaque bon coup était ponctué par une lampée de slivovitsa, et Michel s’est effondré après des annonces farfelues et un trop plein d’alcool, je crois me souvenir que Jean-Claude tenait des propos incohérents."


Puisque Michel fait allusion à ses émois amoureux dans les Balkans, je me permettrai donc d'évoquer le doux souvenir de quelques heures passées en compagnie d'une jeune anglaise qui se prénommait Ann, si je me souviens bien.
C'était sur un bateau qui nous ramenait, Claude et moi (émoi ?), des Bouches de Kotor vers Dubrovnik. Nous étions allés à Kotor avec la 2CV le matin pendant que Michel et Jean-Paul nous y rejoignaient sur le bateau, et nous avions permuté pour le retour.
Retour donc en fin d'après-midi, et rencontre de cette Ann légèrement malade d'une houle soutenue. Je me rapproche pour la réconforter et, coucher de soleil sur l'Adriatique aidant, elle me laissa comprendre qu'elle appréciait ma sollicitude. De retour à Dubrovnik, on se quitte en échangeant nos adresses. 2 ou 3 lettres par la suite quand même, j'en avais encore une dans une boîte à chaussures quelque part, il faudra que je la retrouve. Un meilleur souvenir que la cuite à la slivovitsa évoquée plus haut par Michel...

mardi 24 mars 2009

Jules et Jim au Galdhoppigen

C'était en été 1962 1963, Michel et étions partis en 2CV vers le Nord : Allemagne, Danemark, Suède puis Norvège.
C'est ce dernier pays qui nous avait particulièrement plu, les paysages et les gens plutôt que les "smorgasbrod", ces sandwichs au pain de mie auxquels se résumait, pour nous, la gastronomie locale.Il faut dire que notre budget était serré, et donc nous dormions dans la 2CV. Pour ce faire, le soir, nous démontions le siège de devant et le posions sur celui à l'arrière. La tête sous le volant, les pieds sous ce siège arrière, c'était presque confortable !
Les paysages d'abord : ces fjords impressionnants, cette côte découpée et la baie de Bergen. Entrés par le Nord du pays, nous nous sommes retrouvés dans le massif du Galdhoppigen, sommet le plus haut de la Norvège, où nous avons passés quelques jours de balades en montagne.

Les gens ensuite : un peuple de rudes marins ou agriculteurs, on n'avait pas encore trouvé du pétrole. Des gens sympathiques et accueillants, au milieu desquels émerge la bonne bouille de celle dont Michel et moi tombâmes immédiatement amoureux ! C'est dans le restaurant de ce refuge d'altitude du Galdhoppigen que nous fîmes sa connaissance. Assise avec une copine à nos côtés, nous les vîmes boire une bouteille de Martini pendant leur repas. Et nous ne pûmes nous empêcher de leur faire remarquer qu'en France, c'est plutôt du vin que l'on buvait en mangeant ! Elles étaient un peu "pompettes", la conversation se prolongea assez tard dans notre anglais approximatif et le leur altéré par le Martini. L'amitié franco-norvégienne atteignait des sommets.
Le lendemain, notre intérêt pour notre conquête n'avait pas décru mais nos chemins devaient se séparer. Non sans qu'elle nous donne rendez-vous à Oslo où, nous disait-elle, elle pourrait nous héberger et nous faire visiter la ville.
Et c'est ainsi que nous la regardâmes partir dans son anorak rouge qui se faisait de plus en plus petit sur le chemin qui l'emmenait loin de nous...


Nous continuâmes notre voyage, et c'est impatients que nous arrivâmes à Oslo chez elle pour deux journées en amoureux. Promenades, visites, monuments, nous faisions Michel et moi assauts de gentillesse et de remerciements pour les bons moments que nous passions avec elle. A trois... Comme de bien entendu, nos efforts pour s'attirer ses grâces s'annulèrent et au bout de ces deux journées, nous la quittâmes sans qu'aucun de nous n'ait marqué de points sur l'autre. Mais cela fit un magnifique souvenir. Michel avait gardé les photos de ce souvenir commun. Un peu de Photoshop pour les améliorer. Et une petite larme versée en souvenir.

Mise à jour.

Mon ami Michel/Jules me fait parvenir un addendum à ce billet que je me fais un plaisir de reprendre ci-dessous, sachant qu'il ajoute nombre d'autres souvenirs communs qui feront l'objet de deux autres billets sous peu.
"Dans son dernier blog, où Jean-Claude devient Jim et Michel Jules, ou l’inverse, il nous raconte notre rencontre avec cette norvégienne, dont hélas nous avons tous deux oublié le nom, malgré son souvenir qui reste dans nos cœurs.
Pour moi, et pour continuer avec des références cinématographiques, sa bonne «bouille» m’avait fait surtout penser aux héroïnes nordiques des films de Bergman . Jim a oublié plusieurs détails importants, d’abord nous sommes arrivés dans ce refuge sous la pluie, et par un chemin de terre, qui s’est effondré derrière nous, nous bloquant pour deux jours dans ce refuge. Et nous avons fait la connaissance de notre belle norvégienne, qui elle était bloquée par une cheville défaillante, et c’est en boitillant qu’elle a disparu dans la montagne après cette soirée passée à discuter et à rire. Incidemment c’est en allemand que nous nous comprenions, car ni Jules, ni Jim n’avaient à cette époque la maîtrise de l’anglais. D’ailleurs détail important, à Oslo notre belle norvégienne nous a reçus chez ses grands-parents qui ont refusé de comprendre notre allemand, reste de souvenirs désagréables de la guerre.
Lors de ce séjour forcé dans ce refuge, nous avons aussi rencontré un jeune danois qui nous a reçus à Copenhague dans sa famille, étonnante. Un père écrivain, une mère peintre, qui avec leurs enfants avaient vécu quelques années seuls et en autarcie sur une petite île déserte de Norvège, et, surtout, cette soirée dans un club de jazz, à écouter Buddy Taste, Bud Powell et Sarah Vaughan.
Enfin, pour revenir au début du billet de Jean-Claude, notre voyage en Scandinavie a eu lieu en 1963, et non en 1962.
"
Comme quoi à près de 50 ans de distance les souvenirs varient et se consolident. Pas de souvenirs de ce jeune danois, mais à Copenhague, c'est au Tivoli que nous assistâmes à un concert de Sarah Vaughn. Et si nous sommes allés dans un club de jazz, c'est pour entendre Dexter Gordon plutôt que Buddy Tate. Mais s'il est vrai qu'il y avait ce soir-là Bud Powell, j'ai honte de l'avoir oublié...

lundi 16 mars 2009

Grenoble, c'est pas le Barça !

Mis en bouche par le 4-0 au bout de 40 minutes que le Barça infligeait à l'OL quelques jours auparavant, nous sommes allés hier dimanche au Stade des Alpes de Grenoble, mon beau-fils et moi, pour voir le choc Grenoble-Saint Etienne. Car il est un ardent supporter des Verts, et que je voulais voir ce nouveau stade.

Pour le stade, je n'ai pas été déçu, c'est une très belle architecture avec vue garantie sur les montagnes environnantes. Belle pelouse, belle lumière, à un quart d'heure du coup de sifflet, les supporters stéphanois sont déjà véhéments, ils sont venus en masse !
Tout cela me rappelle mes vingt ans, quand j'allais au stade Geoffroy Guichard à Saint Etienne. Pas de tribunes confortables pour nous mais des gradins en terre battue, debouts pendant 90 minutes pour applaudir les exploits de Abbes, Jacquet, Oleksiak ou Rijvers...

Mais le match vient de débuter. Lentement de part et d'autre ! On atteint la mi-temps sur un score vierge, mais la température est plaisante : 22° au tableau d'affichage.

Cela s'anime un peu ensuite, surtout vers la fin de la partie. Mais au bout des 90 minutes, c'est toujours 0-0. Encore 3 minutes pour les arrêts de jeu.
Le soleil est maintenant couché derrière les hauteurs du Vercors. C'est le moment que je choisis pour rappeler à mon gendre cette citation du Journal du Dimanche que j'ai acheté le matin :
" Mécha Bazdarevic est l'Arsène Lupin des arrêts de jeu : quand l'adversaire pense déjà à sa douche, ses joueurs chapardent un point en toute discrétion. Nantes et Caen sont tombés dans le panneau ces deux dernières semaines. Rattrapé par Monaco à l'ultime seconde, Saint Etienne a le profil de victime. "
Et miracle ou catastrophe, à quelques secondes du coup de sifflet final, but de Grenoble !!! Hervé est anéanti.

samedi 14 mars 2009

Castello della Manta

Le Château de la Manta se trouve dans l'ancien Marquisat de Salusses, enclave piémontaise dans le Duché de Savoie. Au début du XVème siècle, sous l'impulsion de Valerano de Saluzzo, il fut richement décoré de fresques. Celles du grand salon sont particulièrement belles et bien conservées, elles sont dues à un artiste anonyme et datent de 1420 à peu près.


Le mur de gauche du salon représente un Bain de Jouvence, tandis que figurent à droite "9 Preux" et "9 Preuses".



J'ai fait une petite vidéo à partir de brochures prises au château et de photos de Jean-Louis J.

mercredi 11 mars 2009

"Vierge à l'Enfant avec 6 Saints" de Botticelli

Sandro Botticelli (1445 Florence - 1510 Florence) peignit cette "Sainte Conversation" vers 1470, c'est une peinture sur bois (170x194) qui se trouvait sur l'autel de l'église Sant'Ambrogio à Florence. Elle est maintenant au Musée des Offices de Florence. Elle est l'occasion de voir l'évolution de la peinture religieuse sur moins d'un siècle débouchant sur la Renaissance.


De gauche à droite, on voit Sainte Marie-Madeleine et son flacon à onguents, Saint Jean-Baptiste, Saint François d'Assise et Sainte Catherine d'Alexandrie avec la roue qui fut son supplice. Et devant la Vierge, Côme et Damien, saints patrons des pharmaciens et des médecins, et donc des Médicis.
Notre professeur d'Histoire de l'Art préféré, Pierre M., nous a menés par la main dans la découverte de ce tableau. Côme nous regarde et il nous invite à entrer dans cette Sainte Conversation en passant d'abord par Marie-Madeleine, puis à Jean-Baptiste qui, de sa main, nous montre la Vierge et l'Enfant sur lesquels le regard se porte. Les yeux vont alors vers les deux personnages de droite, et ce parcours circulaire se termine avec Catherine d'Alexandrie dont le regard se pause pour finir sur le spectateur. La tristesse de cette dernière est-elle un présage de la passion du Christ ?
La scène se déroule dans une pièce aristocratique, l'ombre portée de Côme sur le sol et celle sur le marbre qui entoure la Vierge suggèrent une pièce de grande hauteur. Une étude attentive révèle que chaque personnage apparaît dans un cadre que dessine l'architecture de la pièce : on se retrouve donc un peu dans un polyptique dont les panneaux articulés auraient été regroupés au sein d'un seul tableau. Le polyptique de l'art religieux du XIVème siècle laisse la place à la "pala" de la Renaissance...
C'est ce qu'illustre la séquence qui suit de "Saintes Conversations" que Pierre M. nous fit découvrir.

En commençant par ce triptyque de la fin du XIVème siècle due au Maître de Santa Verdiana, caractéristique des oeuvres médiévales et gothiques.

Tommaso del Mazza, (dit Le Maître de Santa Verdiana), "Vierge à l'Enfant Entourée de 8 Anges", fin du XIVème, Musée du Petit Palais Avignon.

Un fond doré qui annule toute perspective, des visages stétéotypés, des personnages dont la grandeur est proportionnelle à l'importance, une juxtaposition des panneaux.

Avec Masaccio (1401-1428), nous sommes encore avec un triptyque, la Vierge est le plus grand des personnages, l'or est encore présent :

Masaccio, "Triptyque de Saint Juvénal", 1422, Cascia di Regello, Florence.

Mais un début de perspective fait son apparition. Ici un peu malhabile, en "arêtes de poisson" : on distingue des diagonales parallèles sur le fond sombre du bas. Elles ont la direction des côtés du trone de la Vierge. Les visages restent conventionnels, mais ils s'humanisent.

Vingt ans plus tard encore, Fra Angelico (1400-1455) propose désormais une "pala" de grandes dimensions (220x227) où l'on trouve Côme et Damien dans la pause que reprendra Botticelli.

Fra Angelico, "Vierge à l'Enfant avec des Saints", 1438-40, Musée San Marco, Florence.

La composition est plus élaborée. Un tapis nous invite à entrer dans la toile, une vaste pièce laisse voir à l'arrière un paysage. La perspective n'est pas tout à fait rigoureuse, mais bien présente.

Avec Filippo Lippi (1406-1469), l'Antiquité, objet de recherche de la Renaissance, fait son entrée.

Filippo Lippi, "La Pala Barbadori", 1437, Musée du Louvre, Paris.

Dans cette Pala Barbadori, l'architecture du lieu prend une place importante. Les visages sont individualisés, et l'on sait combien sont beaux les visages peints par Lippi.

Chez Domenico Veneziano (1410-1461), on atteint le raffinement extrême :

Domenico Veneziano, "Rétable de Sainte Lucie", 1445, Palais des Offices, Florence.

Une perspective très étudiée sur un sol créant un large espace où se meuvent avec aisance les 4 saints, une architecture révélant une profondeur savamment construite, il y a de la virtuosité au service d'une très belle Sainte Conversation.
Et si vous me demandez quelle toile je préfère, de Botticelli ou de Domenico Veneziano, c'est pour ce dernier que je pencherai. Et pas seulement parce qu'il est (serait) né à Venise...

mardi 3 mars 2009

Le virtuel c'est bien, le réel c'est mieux !

Je gère le blog d'amis qui visitent l'Amérique du Sud en camping-car. Ils m'envoient tous les 10 ou 15 jours un texte et des photos que je mets en forme dans leur blog, privé. Puis je fais un mailing à 150 personnes de leurs amis pour les avertir des nouveautés. Ils connaissent l'adresse de ce blog, très apprécié. Je constate que ce blog est une interaction virtuelle fort sympathique au sein d'un groupe.

Et puis je me suis lancé dans l'exploitation du blog pour en faire un bouquin qu'ils pourront publier à leur retour s'ils le souhaitent. J'ai fait une maquette en m'appuyant sur la société blurb.com, que je vous recommande. 160 pages tout de même mises en forme à la va-vite, et j'ai fait une petite vidéo pour leur montrer le résultat potentiel. La voici :



Or quand je suis passé du virtuel du récit de voyage à l'écran au réel du livre, j'ai réalisé combien le plaisir sensuel de tenir ce livre dans les mains, de le retourner et de le feuilleter me manquait. Qui ne connait d'ailleurs ce même plaisir d'écouter un CD tout en le contemplant, ou en relisant la pochette ?

Et puisque l'on parle de réel, quel plus grand plaisir que d'apprendre qu'un 5ème petit-enfant est né hier à Paris à 16 heures 06. Et qu'elle s'appelle Colombe...

dimanche 1 mars 2009

Souvenirs d'enseignant

De Montréal à Genève, le changement fut brutal dans ma relation avec les étudiants.

A l'Ecole des HEC de Montréal, j'étais facilement accosté par un étudiant me demandant " Dis, Jean-Claude, tu pourrais m'expliquer...".
Alors qu'à l'Université de Genève, le même étudiant frappait discrètement à la porte de mon bureau pour me dire : "Bonjour Monsieur le Professeur, pourrais-je prendre un rendez-vous avec vous pour...".

A Genève, j'avais un cours de 1ère année avec près de 450 étudiants, une expérience que certains essaient d'éviter, mais que l'on ne regrette pas d'avoir vécue. Dans mon cas, une douzaine d'années. Le souvenir des lundis matin avec les étudiants tout en haut de l'amphi lisant les résultats de ski ou du Servette dans "La Tribune" ou "La Suisse", les journaux locaux.
Avec un tel nombre d'élèves, on ne voit correctement que les 5 ou 6 premières rangées, et gare à l'enseignant qui perd les pédales devant une telle assemblée. Ce qui fut près de m'arriver un jour où je remarquai vers le 5ème rang bien en face de moi un garçon qui, très discrètement, parlait à sa voisine. Le bavardage n'est évidemment pas inhabituel, sauf que je réalisais tout d'un coup qu'il reprenait pour elle tout ce que j'étais en train de raconter. Un doute m'effleura : étais-je à ce point fumeux qu'il était obligé de retranscrire pour sa copine en langage compréhensible ce que je disais ?... Mais je puis poursuivre tout de même. Et en sortant du cours, je me suis rassuré en me disant que la fille venait probablement du Tessin et qu'il s'agissait d'une traduction en italien de mes paroles. Sans trop y croire...

Et quand il fallait corriger plusieurs centaines de copies, ce n'était pas amusant non plus. Je ne suis pas peu fier à cet égard d'avoir repéré une année parmi toutes ces copies deux qui étaient identiques - même écriture - à la couleur du stylo près. Le copieur, de mêche avec son complice, avait récupéré dans le brouhaha de fin d'examen la copie rédigée par ce dernier et l'avait rendue comme la sienne. Comme une partie de l'examen était un QCM sur une feuille séparée, j'ai pu repérer le tricheur par son QCM médiocre. J'ai voulu le contacter pour qu'il se dénonce et que la sanction extrême ne porte que sur lui. Il était déjà parti en vacances aux Etats-Unis, sa soeur n'a pu l'atteindre. Et l'étudiant "honnête" n'a pas voulu dire qu'il avait effectivement écrit la copie à la place de son "copain". Et donc, dans l'impossibilité de les départager, ils ont tous les deux été exclus pour une année de l'Université. La soeur du tricheur m'avait d'ailleurs dit que ce dernier avait obtenu tous les diplômes de sa scolarité de cette façon, et qu'il n'était pas anormal qu'il finisse par se faire prendre.
J'ai revu par la suite l'étudiant honnête (j'enlève les guillemets !) dans les couloirs de l'Université où il était revenu. Il a balayé mes regrets en me disant qu'il avait passé l'année précédente à l'Université de Lausanne, qu'il ne le regrettait et que cela lui avait appris des choses sur l'"amitié" (il mettait les guillemets !) qui lui serviraient dans sa vie. La classe...

J'ai terminé ma carrière à l'INT. Si je devais garder un seul souvenir d'étudiants, ce serait celui de deux jolies jumelles qui se ressemblaient au point d'avoir eu le même parcours scolaire les amenant dans cette même école de management. Elles étaient brillantes, et continuaient à récolter des notes pratiquement identiques ! Pourtant, chez moi, l'une obtint 19 tant que sa soeur n'eut qu'un 15. Comme je les rencontrais à quelque temps de là, et que je plaisantais sur cette différence, l'une d'elle me demanda : "Est-ce que c'est vous qui faites le cours de deuxième année ?". Et comme je lui répondais que non, elle me dit dans un soupir "Dommage...".